Histoire de Saint Jean de Boiseau

La commune, Coutumes et traditions d'hier



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Cette page est en partie inspirée :
- d'un document inédit écrit par Pierre Fréor qui fut un historien local né à Lorient (Morbihan). Celui-ci passa toute son enfance sur notre commune et s'établit ensuite sur le territoire limitrophe de La Montagne qui fit partie, comme nous le mentionnons sur notre page la scission de St Jean de Boiseau jusqu'en 1877.
- d'archives paroissiales écrites notamment au milieu du XIX° siècle.
- de documents divers remontant à la même époque.

Vous y trouverez les rubriques suivantes :
1 - Les feux de la St Jean
2 - La veillée au village
3 - La maison
4 - Les costumes
5 - Les divertissements
6 - L'agriculture
7 - L'activité éconmique

1 - Les feux de la Saint Jean :

Le début de l'été était rituellement marqué par des festivités dénommées : feux de la Saint Jean.
Les gens se réunissaient dans un lieu découvert et haut placé. Ils y allumaient un grand feu de fagots et dansaient, chantaient autour pendant que les plus hardis se lançaient pour traverser le brasier. Tout ceci accompagné par le son du poëlon, on faisait « vroumer la poêle ».

En quoi consistait cette opération ? :

Les accessoires étaient très limités : une grande bassine de cuivre (comme pour la lessive), des joncs, de l'eau et ... deux exécutants. Cela fonctionnait selon le principe du violon, une corde vibrant sur une caisse de résonnance à l'aide d'un archet. La corde, ce sont les joncs rassemblés en faisceaux, la caisse de résonnance, c'est la poêle et l'archet, les mains (on passait de la colophane sur les crins de l'archet pour mieux accrocher la corde ; ici on se sert de vinaigre pour humecter les joncs). La poêle était le plus souvent placée sur un trépied pour laisser le maximum de surface vibrante ; on y versait de l'eau pour y tremper les joncs et les mains tout en amplifiant les vies. Chacun des exécutants se plaçait de chaque côté de la poêle, l'un retenant fortement les joncs sur le rebord du bassin sans en toucher les bords avec les doigts, et l'autre frottant les joncs dans le sens de la longueur en les prenant dans ses mains.

Le son produit, assez sinistre et plaintif pouvait s'entendre de très loin, puisque sur la commune, Boiseau, le bourg et la Télindière se répondaient ainsi. Pour accentuer les vielles, on pouvait plonger dans l'eau de la bassine des objets métalliques comme des pièces de monnaie ou encore un chapelet rappelant l'origine religieuse de ce rite : la St Jean.

Certains voyaient dans cette tradition un appel aux morts (la St Jean était la christianisation de l'une des occasions celtiques où l'âme des morts rendait viste aux vivants : le passage au solstice d'été, d'où l'ambiguité païenne/chétienne).

Mais sans aller jusque là, c'était avant tout un appel à la fête, à danser autour du feu. On ne sait pas à quand remonte cette tradition, mais cela s'est refait pour la dernière fois dans les années 1950-1955 sur la place de l'église et le « vroumeur » était Francis Braud, membre du groupe Sant Yann et habitant Boiseau.

2 - La veillée au village :

Autrefois, les conditions de vie étaient fort différentes de celles que nous connaissons actuellement. Electricité, télévision ne pouvaient figurer parmi le quotidien de nos ancêtres. Les habitants
- par souci d'économie d'éclairage et de chauffage
- également par besoin de contacts pour connaître les nouvelles
se réunissaient donc le soir dans une grande pièce et se livraient à un certain nombre d'activités :

3 - La maison :

L'habitation comprenait ordinairement une seule pièce que l'on séparait par des armoires ou des vaisseliers pour ceux qui en possédaient. Une grande cheminée à griller, un banc de bois de chaque côté du feu, quelquefois une grande et lourde table, deux bancs grossiers, et les lits parfois à baldaquins dits à « quenouille ». C'était là la seule richesse de la maison. Des coffres où l'on plaçait les habits et qui servaient aussi pour accéder aux lits très hauts à cause de l'humidité du sol en terre battue, le rouet et les quenouilles.

La lumière du jour n'entrait que difficilement dans la maison. Les fenêtres, quand il y en avait, étaient très petites. C'est auprès de ces fenêtres que les femmes se tenaient pour filer ou coudre dans la journée. Les portes se faisaient face et étaient dépourvues de vitres. C'étaient des portes pleines, très lourdes, où l'on ménageait vers le haut, un petit trou en forme de coeur qui ne donnait pas grande lumière, et dans le bas, la chatière pour que le félin puisse entrer et sortir à sa guise.

Les repas se prenaient ordinairement accroupis autour de la chaudière où avaient été cuites les « patates » et les choux. La viande était rare et ne se trouvait qu'aux grandes occasions : repas de noces, de communion etc.

Les femmes mangeaient à « croupeton » près du chaudron et les hommes à table et chacun prenait directement dans le chaudron placé au milieu de la pièce.

Le pain était boulangé à la maison et cuit au four banal, on boulangeait à la demande et une réserve était créée au râtelier, sorte de civière à claire-voie clouée aux grosses poutres du plafond.

Le beurre, lui aussi, était rare, le sucre presque inconnu. Une de nos aïeules - la mère Perrine - avait coutume de dire en piquant un « mosseau » (morceau) de « patate » bouillie : « Qu'aurait un p'tit d'beurre que ça s'rai pourtant bon ».

4 - Les costumes :

Le costume des hommes de St Jean diffère de ceux des communes limitrophes essentiellement par les pantalons. Ces culottes en drap de Rolinge ou droguet, aux couleurs bleu et rouge dominantes sont larges et tombent seulement à la cheville du pied ; serrées à la ceinture, elles forment différents plis et dispensent de l'usage des bretelles. Elles sont du même modèle que celles des mariniers du haut de la Loire. Leurs gilets ou vestes descendent fort bas et rappellent un peu par leurs plis les anciens justeaucorps.

Pour travailler les hommes portaient, outre leur pantalon de droguet, la blouse de grosse laine, un bonnet de coton bleu dit « mite », les sabots à bouts pointus et de gros bas d'étoupe dits de « sicovis », surtout pour le « déragoulage » (travail de la vigne) et la coupe du « roux » (roseau). Pour couper le « roux », les sabots de bois à semelles très épaisses étaient garnis de tiges de toile également très épaisse, solide, pour protéger les jambes. Le travail était très pénible et dangereux dans les « coutières » de « roux ».

Les dimanches et fêtes, les hommes se vêtaient d'une blouse bleue tombant à mi-cuisse qui protégeait le paletot de drap noir, le pantalon à pattes d'éléphant - en drap également noir. La coiffure, un haut bonnet de coton bleu avec pompon que l'on appelait bonnet à « roupettes », des sabots noircis er cirés ; la chemise de grosse toile à col debout, et parfois comme coiffure, le haut de forme en tromblon gris et souvent à rebrousse-poil. Les femmes pour leurs travaux portaient un bonnet blanc qui contenait tous les cheveux nattés emprisonnés dans une résille, le corsage (le « cor » de drap), les cotillons assez courts et la « devantière » (tablier) de laine, de gros bas de laine et des sabots.

Le dimanche, la grande câline ornée d'une pièce de velours et de deux rubans noirs qui pendaient dans le dos jusqu'à la ceinture chez les veuves, et de couleur chez les jeunes. Le corsage et les cotillons étaient noirs chez les vieilles femmes et de couleur brune, rouge ou verte chez les jeunes filles. Peu ou point de bijoux, sauf chez les riches qui portaient des bijoux d'or : pendants d'oreilles, broches ou croix et le sautoir en or. La tablier était de moire agrémenté de dentelles. Pour les chaussures, les sabots vernis noirs ou jaunes.

5 - Les divertissements :

Aux fêtes, on dansait beaucoup. C'était avant tout des rondes chantées, des polkas un peu lourdaudes qui, si elles n'étaient pas toujours dans un bon rythme, permettaient quand même de bonnes parties de rigolade. On pouvait y trouver :

De vieux ménestriers inventaient des danses particulières : le lapin, le Manège, la Piquée, l'Hirondelle, la Youchtka etc.

Toutes ces danses disparurent vers le milieu du XIX° siècle et furent remplacées par la Polka Mazurka, Scottisch Valse, Quadrille français, auxquelles vinrent s'ajouter les danses de caractère : Pas de quatre, Berline, Sagantina, Badoise, Pas des patineurs, Tzarine etc. jusqu'à la guerre de 14-18.

6 - L'agriculture :

Les terres labourables forment un peu plus de la moitié de la superficie totale ; la vigne, le quart ; les blés, les 2/10. Les terres y sont divisées de telle sorte que la masse totale qui forme 1238 hectares ( N'oublions pas qu'à cette époque, La Montagne fait encore partie de St Jean ) donne 14 072 articles ou parcelles. Ce grand fractionnement nécessite la petite culture. Chaque cultivateur ayant son champ veut le faire fructifier et là peut-être moins qu'aileurs la terre se repose. Mais la facilité que l'on trouve à se procurer les engrais fait qu'elle n'est pas épuisée. Les menus graines, la pomme de terre et les légumes se consomment dans le pays mais les froments et le vin s'exportent et jettent dans les classes des laboureurs une aisance que l'on trouve malheureusement pas dans nos communes. Les transports agricoles se font presque tous à dos de cheval et la culture à la main. On ne compte guère qu'un métayer. Chacun ne produit du vin que pour sa consommation.

7 - L'activité économique :

La batellerie et les ports :

La proximité immédiate du fleuve ne pouvait pas ne pas avoir d'influence sur la vie des habitants. L'activité fluviale s'est donc fort logiquement développée à tous les âges qu'il s'agisse de transports, de pêche, de culture etc.

Au XIX° siècle, deux chantiers de construction navale existaient sur la commune :
- Le chantier Averty
- Le chantier Barraud-Minée

Dans les années 1830, le chantier Averty est beaucoup plus important que son concurrent. Situé à Boiseau, en bordure de l'actuelle Rue de la Perche, son implantation géographique joignait outre la proximité immédiate du fleuve, le fait de se situer tout près de plusieurs bois ( La cruaudière, les Herbegeorges, le bois des Fous ) qui lui assuraient une facilité d'exploitation des matières premières qui lui étaient nécessaires. Son activité devait être suffisamment intense pour qu'il soit le lieu de constructions de nombreuses embarcations ( plus de 40 toues sont dénombrées à cette époque pour St Jean et La Montagne. Au tout début du XX°, son activité commence à régresser, le livre de comptes qu'il détenait nous montre, en effet, une baisse d'activités importante.

Le chantier Barraud-Minée, lui, est situé à La Télindière (autre extrêmité de la commune). Son activité sera plus tardive et c'est vers la fin du XIX° siècle qu'il commencera à prendre le pas sur son coucurrent boiséen bien que la surface dont il disposait restera toujours moindre ( ses possibiltés d'extension restaient faibles ). Malgré ce handicap, il se lancera dans la construction de chalands nantais (embarcations de 22 mètres de long sur 4,50 de large pouvant transporter 140 tonnes de frêt). Le début du XX° siècle avec l'avènement des coques métalliques commencera à sonner le glas des bateaux de bois. Minée ne croira pas au modernisme et conservera ses méthodes de travail. Ce sera son petit-fils qui prendra sa suite et continuera cette activité jusque dans les années 1950.

Le commerce :

Comme partout, le petit commerce perdurera longtemps à St Jean. Cette activité était souvent considérée comme un supplément de revenus et ne permettait qu'assez rarement de vivre par sa seule présence. Les exemples sont nombreux, y compris au XX° siècle, de personnes qui se livraient à ce négoce. Un de nos anciens a dit en parlant d'une épicerie qu'il avait connue : «  C'était vraiment peu de choses, il y avait des sacs de lentilles, sacs de sel, sacs de son, quelques allumettes - quoique celles-ci étaient plutôt vendues au bureau de tabac -, un peu de café en vrac, peu de choses et puis surtout ce qu'elles vendaient les épicières à l'époque, c'était du beurre. Elles allaient chercher le beurre au marché et le revendaient
... ce qui m'effare un peu, c'est le peu de volume qu'ils avaient au fond parce qu'ils travaillaient pour rien quoi pratiquement. Tu te rends compte, une petite épicerie tenue par une vieille personne vendant du sel, des lentilles un peu de café, du beurre, un peu de mercerie aussi … mais il y avait des trésors aussi là-dedans …».

Le recensement de 1896 nous apprend ainsi qu'à St Jean 35 personnes avaient pour activité principale le commerce et, ce, pour une population globale de 1948 habitants.

L'élevage :

Un revenu non négligeable a prospéré sur la commune : l'élevage des chevaux. Les habitants achètent ceux-ci très jeunes et les mettent sur les îles en Loire à la belle saison. L'entretien est quasi nul et rapidement les animaux prennent un embonpoint qui les fait rechercher sur les foires de la région. Cette pratique assure des revenus parfois fort importants et des éleveurs spécialisés se sont installés sur la commune. Elle est encouragée par le fait que l'armée recherche encore beaucoup à cette époque les éléments nécessaires à la traction animale qui est quasiment la seule employée et les chevaux de St Jean disposent d'une cote appréciable.

Outre la race chevaline, les bovins sont aussi une autre source de revenus exploitée et il n'est pas rare de voir sur les îles ces animaux brouter l'herbe ou les jeunes pousses de roseaux lorsqu'un propriétaire veut voir disparaître ces végétaux. A contrario, cette attirance des bovins vers ces jeunes pousses a parfois provoqué des conflits avec ceux qui vivaient de l'exploitation des roseaux et notamment la fabrication des courtines.