Histoire de Saint Jean de Boiseau

Quand une coutume locale rime avec
emmaillotement une coutume nationale



A Saint-Jean-de-Boiseau, il existait une coutume locale : faire rouler les nourrissons sur l'autel de la basse-chapelle de la chapelle de Bethléem dans l'espoir d'améliorer leur tonus musculaire et ainsi améliorer leur marche.

La chapelle de Bethléem est sous le vocable de la Vierge Marie. Durant près de quatre siècles, les boiséennes ont roulé leurs jeunes enfants sur l'autel de la basse-chapelle dans l'espoir que leurs prières soient exaucées.

Cette coutume a disparu après la seconde guerre mondiale.

Autrefois, dans toutes les contrées de France, des enfants étaient emmenés vers les sanctuaires dans l'espoir d'améliorer leur tonus musculaire. Le plus souvent, les enfants étaient déposés au pied d'un saint ou bien déposés sur un autel. Nulle trace d'un autre lieu où, comme ici à Saint-Jean -de-Bouguenais les enfants étaient roulés sur un autel.

A Saint Paul de Varax , dans l'Ain, des enfants étaient roulés sur un autel « comme on roulait des boulettes dans de la farine » mais dans l'espoir de les préserver des convulsions.

En 1922, l'archiviste en chef nantais Léon Maitre a omis de citer comme sainte guérisseuse la Sainte Vierge à la chapelle de Bethléem parmi les saints guérisseurs de Bretagne dans son livre « Les saints guérisseurs et les pèlerinages en Armorique ».

A Rezé, à la chapelle de Notre Dame de Bonne Vertu, deux saints étaient honorés : Allant et Venant. Les mères évaluaient au fil des jours le périmètre de marche de leurs enfants entre ces deux saints.

En France, les sanctuaires voués à l'augmentation des forces musculaires des enfants semblaient moins nombreux que ceux voués à la guérison des yeux ou du « mal de dos ».

Autrefois, nos aïeux imploraient les saints pour les guérir de tous leurs maux. De nos jours, les professionnels de santé sont sollicités pour la guérison de tous les maux.

Autrefois les mères, imploraient les saints d'accroitre la force musculaire de leur enfant. De nos jours, aucune jeune mère n'éprouve le souhait d'emprunter les clefs de la chapelle de Bethléem afin de faire rouler son enfant sur l'autel de la basse-chapelle dans l'espoir d'améliorer leur tonus musculaire. A l'exception de certaines pathologies congénitales, les prises en charge de renforcement musculaire des membres inférieurs des nourrissons par les professionnels de santé sont rares.

En voici la raison : la faiblesse « hypotonie » musculaire était liée à l'emmaillotement de la première année qui a duré pendant des siècles. L'emmaillotement était pratiqué depuis l'Antiquité. Une longue et étroite bande d'étoffe nommée « maillot » maintenait serré les bras le long du corps et les jambes tendues dans le prolongement du tronc car on croyait que si l'enfant n'était pas rectifié dans les premiers jours, il aurait les jambes et le dos tordus. Vers 6 mois, on libérait les bras puis vers 1an, on dégageait les jambes.

L'avantage pour les mères : Il protégeait l'enfant du froid. L'enfant était facile à garder sans surveillance et il pouvait même être accroché au mur pour éviter les accidents domestiques.

Mais cette pratique de l'emmaillotement a été très critiquée par les médecins du XVIII°siècle. Elle était jugée rétrograde parce qu'elle limitait le développement musculaire du nourrisson. Cependant, malgré les recommandations des médecins, l'emmaillotement a perduré.

Les conséquences l'emmaillotement durant la première année sont des troubles importants de la marche.

L'enfant, pour se renforcer, a besoin de se mouvoir dès la naissance. A la suite d'une année sans mouvement, le tronc et les jambes sont flasques et ne peuvent supporter le poids de l'enfant en position debout. L'emmaillotement aggravait la fonction motrice de l'enfant lors de pathologies congénitales et de traumatismes liés à l'accouchement.

L'une de pathologies congénitales est la luxation congénitale de hanche. C'est une malformation osseuse entraînant un défaut d'emboîtement au niveau de la hanche. Cette pathologie est connue surtout en Bretagne, en Vendée et en Auvergne. La bretonne la plus célèbre ayant eu une luxation congénitale de hanche est Anne de Bretagne. Anne de Bretagne a dû être emmailloté. Si elle avait vécu au XXe siècle, elle aurait eu un traitement orthopédique. L'emmaillotement a favorisé les boiteries de hanche de ces enfants.

L'autre pathologie est les pieds bots. C'est une déformation du pied due à une malposition intra-utérine entraînant une paralysie des muscles du pied. Là aussi l'emmaillotement aggravait la déformation du pied et la paralysie des muscles par manque de mouvement.

Quand les enfants ont commencé à marcher, pour pallier à leur marche déficiente, les pères et les grands-pères ont eu des idées ingénieuses. Voici quelques exemples de baby-trotter fabrication maison.

A la fin de mon exposé, j'ai demandé à l'assistance « Qui a été roulé sur l'autel ? » Quelques personnes de 60 à 70 ans ont levé la main. La coutume semble s'être stoppée après la seconde guerre mondiale.