Histoire de Saint Jean de Boiseau

Le curé Henri Garnier





A la Télindière, la rue principale porte le nom de Henri Garnier. Les personnes les plus anciennes de la commune se souviennent peut-être de ce personnage, car il s'agit d'un enfant du « pays », originaire de ce village.

L'enfance et la formation de l'Abbé Garnier

Son père, Jean-Baptiste Garnier, est ajusteur à Indret. Il est âgé de 30 ans lorsque le 13 janvier 1902, vers 19h, naît à la Télindière en Saint-Jean-de-Boiseau, Henri, Jean-François Marie, un garçon, dont la mère Françoise, Marie-Anne Averty est sans profession. Il est déclaré en mairie deux jours plus tard par son père dont les témoins sont le coiffeur Elie Ringeard et Pierre Huet le boulanger tous deux du bourg.

L'enfance et la jeunesse de Henri Garnier se passent dans la maison familiale, rue du Bac. Une jolie maison dont la façade porte une niche qui abritait la statue de Sainte Anne.

Après des débuts scolaires à l'école Saint-Marc, il décide de s'engager dans le sacerdoce et poursuit ses études religieuses au petit séminaire de Pontchâteau de 1913 à 1917, puis, à Bel-Air de 1917 à 1919 et au petit séminaire des Couëts de 1919 à 1921.

Il rejoint ensuite le Grand séminaire de Nantes en 1921.

Sa formation religieuse est interrompue pour effectuer son service militaire, du 16 mai 1922, sous le matricule n°68 1 R 1444, d'abord au 172ème régiment d'infanterie (caporal le 24 octobre 1922). Puis il passe, le 21 mars 1923, au 8 ème bataillon de chasseurs mitrailleurs, et le 20 juin 1923 au 1o ème bataillon de chasseurs mitrailleurs.

Il est libéré le 4 novembre 1923, et est nommé sergent de réserve.

Début novembre 1923, il retourne au Grand séminaire de Nantes où il est tonsuré le 29 juin 1925 et ordonné prêtre le 28 juillet 1928.

Le guerre et la captivité

Son passage dans cette paroisse nantaise sera de courte durée et hélas sa dernière affectation. En effet, de graves évènements se déroulent à cette période et la guerre est déclarée à l'envahisseur allemand. Il est alors rappelé comme sergent le 27 août 1939, au dépôt 112 de la 34ème compagnie d'instruction à la Roche S/Yon. Puis à la mi-novembre il est à Quimper pour l'instruction militaire. Reprendre à 39 ans ce type de formation ce n'est pas folichon et les abbés Chiffoleau et Mainguet ( Granchamp) retrouvée là, lui remontent le moral.

En avril 1940, Il est affecté au dépôt d'infanterie (137ème régiment d'infanterie). C'est le départ pour le front, 34 heures de train vers les Ardennes où il arrive en pleine nuit. Il est dans un petit village de 200 âmes, d'une hospitalité charmante et généreuse. Le dimanche, la petite église est remplie de soldats qui chantent à plein cœur. Il organise un « Foyer du soldat » en attendant des jours meilleurs. Mais le bonheur est de courte durée. Le 12 mai, il écrit une petite carte : Nous sentons la guerre. Drôle de Pentecôte, qu'allons nous devenir ? A la volonté de Dieu.

Le 29 mai, il dit sa peine. Il n'a pas reçu de lettre depuis 15 jours, et il ajoute : depuis le 18 mai, j'ai quitté les Ardennes, je suis en ligne, mais en troisième ligne avec mes jeunes. Nous avons débuté en forêt, vie primitive, abri individuel, messe en plein air. Maintenant, nous organisons la défense d'un canal, nous travaillons de nuit. Je ne crois pas que les allemands puissent facilement passer ... »

Hélas, ils vont non seulement passer, mais il va être fait prisonnier peu après.

Deux mois plus tard il écrit sa première lettre de captivité.
Troyes 27 juiller 1940 Vous excuserez mon long silence.
..prisonnier depuis le 17 juin, j'ai été heureux de trouver ici Jean-Marie Leroy et Ferdinand Maisonneuve. Jean-Marie ne me reconnaissait plus. J'ai beaucoup changé, je suis tellement amaigri. Certains prisonniers sont libérés provisoirement sur présentation de certificat d'emploi....venez, venez nous chercher...
»

Dans cette lettre on constate que son moral est au plus bas et qu'il lance un appel au secours qui ne viendra pas.

Il est, tout d'abord envoyé au stalag 4 F à Hartmansdorf-B/ Chemnitz, puis en septembre il est au stalag XVIII B en Autriche. Malheureusement, dans cet immense camp il n'a pas et pu 8 rencontrer huit de ses compatriotes qu'il connaissait : Pierre de Vieuville, Jean-Marie Leroy, Henri Martin de la vièvre, Marcel Martin de la Gournière, Jean Bodin du bourg de St Jean, Félix Pinel de la Rablais, louis Clouet de la Mirais et Ferdinand Maisonneuve de la Mouline.

En novembre, il est envoyé, en Saxe, dans un commando, pour travailler dans une fabrique de sucre, la Zucker Fabrik à Doëbeln. Il y est accueilli avec joie par des amis connus. Parmi les 150 camarades du Kommando, il se retrouve avec un prêtre du diocèse de Vannes, l'abbé Royer. Du vin et des hosties ont pu être apportés par un bénédictin, curé de cette ville de Doëbeln. Il peut ainsi célébrer quelques messes clandestines avant le réveil. Le travail à la sucrerie est très dur et les journées très longues. Henri Garnier très amaigri ne peut résister longtemps à ce régime trop pénible. Par manque de nourriture et dans le froid, il tombe malade et est hospitalisé pour une entérite aiguë le 14 janvier 1941.

Le 18 janvier, Louis Clouet écrit au curé de la Chapelle s/Erdre : Je dois vous apprendre une bien triste nouvelle, il y a 4 jours , Henri Garnier est parti à l'hôpital...

Malgré de bons soins qui lui sont prodigués à l'hôpital militaire de Honhenstein. Ernsshaul près de Zwinhau (Saxe) et une opération, son état s'aggrave et la médecin avertit ses parents de la gravité du mal.

Le 2 mars, Henri Garnier reçoit la visite de trois amis de Nantes et le 4 mars à 7 heures,l'aumônier visite dire la messe dans sa chambre, lui donne le Saint-Viatique et l'extrême onction. puis il plonge dans une douce agonie et il décède le jous même.

Une lettre reçue d'un religieux infirmier dans l'hôpital précise : L'abbé Garnier s'est endormi dans la paix du seigneur

Une messe fut célébrée par le père Royer à l'intention du disparu. En Février1948 son corps est ramené à son domicile familial à la Télindière où de nombreuses personnes viennent se recueillir sur son cercueil. L'inhumation dans la concession familiale au cimetière de Saint-Jean-de-Boiseau se déroule en même temps que celle de René Chagnas, première victime de la commune de cette terrible guerre. Le cercueil de ce dernier fut exposé à la marie.

Lors de la cérémonie funèbre, les deux cercueils recouverts d'un drapeau tricolore furent placés dans l'allée centrale de l'église qui s'avéra trop petite pour accueillir les paroissiens de la commune ainsi que ceux de Mouzeil et de la Chapelle sur Erdre.

La paroisse de la Chapelle-sur-Erdre, fit réaliser son portrait en bronze pour être exposé dans la salle Saint-Michel qu'il avait fait construire.

Quelques années plus tard, on nommera la rue principale des commerces de la Télndière du nom de ce jeune prêtre mort pour la patrie.

Louis le missionnaire

Henri Garnier avait aussi une sœiur. Jeanne et un jeune frère Louis né le 3 janvier 1917 dans la maison familiale de la Télindière. Il suivra les pas de son frère dans la prêtrise et se fera missionnaire. Il fit son noviciat à Maison-Carrée en 1937 avec comme maître le père Betz qui dira de lui : il avait une heureuse influence sur la communauté et ferait un parfait père Blanc.

Durant son scolastique à Thibar, en Algérie, province de Kabylie, il prête serment le 26.06.41 et est ordonné le 18.04.42. Pendant cette période, il apprend l'Arabe et enseigne cette langue à ses confrères. Il est ensuite affecté à l'infirmerie, puis obtient sa première nomination à Ouaghzen ( Kabylie) et se spécialise dans la langue kabyle.

En novembre 1942, il est mobilisé et est aumônier d'un bataillon du génie. Il fait preuve de courage et de dévouement dans cette guerre en Afrique qui lui valent une citation : D'un dévouement et d'une activité inlassable, il est constamment auprès des éléments les plus avancés qu'il assiste et joue un rôle considérable dans la haute valeur morale des sapeurs de la division. Il n'hésite pas à aller sous le feu de l'ennemi porter le secours de la religion aux combattants et son aide matérielle au service sanitaire. Le 16 avril 1945, il est grièvement blessé au cours d'un bombardement d'artillerie, en se rendant à un poste de secours. Il est décoré de la Croix de Guerre avec étoile d'argent.

Démobilisé en novembre, il retourne à Ouaghzen. De là, il est nommé, en août 1947, professeur, puis directeur de l'école de Taguemout Azouz. Il s'occupe aussi dans cè village d'un groupe de scouts.

En septembre 1949, il souhaite se perfectionner dans les langues arabes littéraires et reste un an à la Manouba en Tunisie.

L'année suivante il est de retour en Algérie, au collège de Beni Yenni (Ait Larba) où il enseigne et assure les fonctions de surveillant général.

En juin 1952, on lui confie la fondation et la direction de l'internat, dans les bâtiments de l'ancienne Maison-Mère, à Maison-Carrée. Le collège compte 80 élèves, dont 30 musulmans. Le personnel enseignant est composé de missionnaires et de laïcs. Lui-même donne des cours de religion aux chrétiens et de morale aux musulmans Très vite l'établissemerit s'avère trop petit. Il faut ouvrir de nouvelles classes et augmenter le personnel. Il fonde aussi une association des parents d'élèves. Il ne perd cependant pas de vue les activités de sa communauté à laquelle il apporte son aide.

D'apparence chétive , Il fait cependant preuve d'une grande résistance et supporte très bien la fatigue.

Dans les années 59-60 , il remplace un collègue au collège de Béni-Yenni, puis il part faire une grande retraite à Mours, en janvier 1960.

A son retour, il est nommé supérieur du collège de Béni-Yenni.

En 1967, il est élu délégué au Chapitre et, en juin 68, il est nommé Régional d'Algérie-Nord et réside dans la capitale, Alger, rue des fusillés. A cette fonction périlleuse dans le climat d'hostilité qui suit la guerre d'Algérie, il est apprécié de ses confrères pour sa délicatesse et son bon sens. En janvier 1972, il est reconduit dans son mandat. En 1974 il participe au Chapitre comme délégué de droit.

En octobre 1975, il achève son second mandat et retourne en Kabylie où il restera encore 18 ans, d'abord comme supérieur de Boghni, puis à partir de septembre 1976 comme curé de Tizi-Ouzou. C'est dans cette ville qu'il trouvera la mort, le 16 octobre 1993, dans un accident d'automobile.

Lorsque Louis Garnier revenait à Saint Jean il aimait retrouver les enfants du patronage dans le parc du château du Pé. Le Père Gautret de la Télindière, se souvient bien de lui car il organisait des jeux avec le nom des populations de sa mission étrangère.

Sa passion pour ce peuple lui fera adopter la nationalité algérienne et c'est en cette terre qu'il repose désormais.

Sa sœur Jeanne se mariera avec Mr_.Doceul. Ce sera la dernière occupante de la maison Garnier en 1976. Celle-ci est aujourd'hui propriété de Mr et Mme Cadeville.