Histoire de Saint Jean de Boiseau

Les cahiers de doléances



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Introduction :

C'est le 16 mars que Danghin, curé de la paroisse reçoit l'ordre de communiquer à ses paroissiens la convocation pour les Etats Généraux qui ne s'étaient pas réunis depuis ...1614 : « Sa Majesté désire que s'assemblent dans les villes et les villages dans le plus bref temps, les habitants pour conférer ensemble tant des remontrances, plaintes et doléances que des moyens et avis qu'ils auront à proposer et pour élire, choisir et nommer des personnes dignes de confiance, capables de transmettre ces remontrances et propositions aux divers états ».

Le 31 mars, 12 notables de St Jean, le curé Danghin et quelques dizaines d'habitants se réunissent dans le cimetière « la chambre (la sacristie) étant trop petite pour contenir le peuple ». Ils établiront leur cahier de doléances. La modération du ton montre qu'ils croient encore dans la justice du roi. Leurs réclamations visent donc principalement la seigneurie locale, le sieur de Martel avec qui ils ont des démélés.

La justice prime :

Ce souci d'une plus grande justice semble primordial dans l'esprit de nos concitoyens. C'est sans doute la raison pour laquelle les premiers paragraphes de leur cahier traiteront tous de cet aspect.

Allègement des impôts :

Cette pression est écrasante pour le peuple et il convient donc d'en alléger autant que faire se peut la charge. Aussi nos habitants vont-ils énumérer certains de leurs griefs qu'il s'agisse de :

Plus de libertés :

La société de l'époque avait ses règles qui ne pouvaient satisfaire tout le monde puisqu'elle était fondée sur le principe des privilèges, système qui sera aboli durant la nuit du 4 août. Si ce fut une des premières mesures prises par le futur pouvoir révolutionnaire, c'est qu'elle correspondait à une aspiration profonde parmi le peuple. St Jean n'échappe pas à cette règle. La vie est subordonnée en grande partie au travail de la terre. Or, les seigneurs se sont arrogés des droits qui contrarient le travail des cultivateurs :

L'égalité entre tous :

Le peuple a décidément bien des devoirs et peu de droits. Il est astreint à certaines actions auxquelles échappent naturellement les tenants du pouvoir.

La Loire, artère vitale :

Les gros villages de St Jean, le Fresne, Boiseau, Le bourg, La Télindière étaient tous situés en bordure immédiate du fleuve qui se trouve être l'artère économique de la région. C'est en effet à l'époque le moyen de transport le plus aisé. Or depuis quelques décennies, le lit du fleuve a été modifié artificiellement et les boiséens, non seulement ne disposent plus d'un accès direct à ce fleuve mais voient en outre cet accès continuer à se dégrader. Ils réclament donc « que le port ou pour mieux dire la rivière, à l'endroit où se font les exportations ou importations des denrées de la paroisse, soit rendu libre et navigable en tous temps ». Nos ancêtres ne peuvent comprendre que l'« on a jeté et on jette continuellement des tas de pierres considérables qui bouchent le cours de la rivière et causent un préjudice considérable à la paroisse ». Après avoir indiqué que plusieurs bateaux se sont perdus sur ces nouvelles constructions et que plusieurs habitants y ont couru des dangers tels qu'il s'en ait fallu de peu que plusieurs d'entre eux en perdent la vie, ils demandent « que les pieux et les pierres soient ôtés aux frais et dépens des afféagistes qui les ont fait mettre, et qu'on coupe, ou la digue du côté du Fresne, ou la queue de l'île d'Indret en dessous du crucifix de la longueur de quarante brasses, avec le droit d'y pêcher librement »

Quelques commentaires :

Le curé Danghin qui était un homme très en pointe sur le plan des idées est en grande partie à l'origine de la rédaction de ce cahier. Il n'en demeure pas moins que son contenu s'inspire des cahiers-type qui circulaient à l'époque. Il en est ainsi des paragraphes qui traitent des corvées, de la milice, des fuies et garennes, de l'inégalité des impôts, des terres vagues et des communs etc. D'autres restent toutefois directement liés aux problèmes que vivent quotidiennement les boiséens, ainsi l'exemple du fleuve. Mais au-delà de ces considérations, ce qui est peut-être le plus frappant, c'est de constater que le peuple croit encore en la justice du roi et que ses griefs vont à l'encontre du seigneur local. Ces cahiers montrent donc que le peuple des campagnes (St Jean n'est pas un cas isolé) n'est pas prêt pour une Révolution. Il voit seulement dans cette décision royale de faire remonter les doléances jusqu'à Versailles une opportunité de faire connaître ses malheurs et, qui sait, d'obtenir quelques modifications qui amélioreront ses conditions de vie en retirant un peu des pouvoirs au seigneur local. Des décisions qui pourraient paraître impopulaires seront prises dans les années qui vont suivre sans soulever de véritable colère. Il faudra attendre mars 1793 et la levée de 300 000 hommes pour que la région se soulève. Mais St Jean ce jour-là aura choisi son camp et ne participera pas au soulèvement.